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Désobéissance civile


Note réalisée par EMMA dans le cadre de l'action DROIT ET MOUVEMENT SOCIAUX
Redaction_fiche_desobissance_civile.pdf(0.8MB) attention document interne en cours de relecture
Nous avons tenté de répondre à cette question Quelle légitimité pour la pratique de la désobéissance civile ?
Nous en avons débattu avec deux représentants d’Alternatiba, l’association visée à Poitiers par une demande préfectorale de retrait de subvention pour avoir proposé un atelier sur cette pratique non violente lors de son « village des alternatives » en septembre dernier. Une nouvelle attaque aux libertés associatives, conséquence de l’entrée en vigueur du contrat d’engagement républicain.

Retrouvez ICI le compte rendu synthétique et les liens proposés : 2022_CAC_CAFE_25_octobre_CR.pdf (0.6MB)
La vidéo des échanges


Télécharger Fiche_dsobissance_civile_7dec.pdf (0.7MB) la fiche réalisée par Emma Marc (CAC)

Voilà -en résumé- quelques points de cette rencontre avec Florent et Raquel d’Alternatiba qui sont venus nous présenter cette notion d’un point de vue historique, théorique et pratique.


Nous nous sommes posés cette question après « l’affaire de Poitiers », pour laquelle le préfet exigeait de la mairie de Poitiers le retrait d’une subvention après que l’association ait proposé un atelier sur la désobéissance civile dans son « village des alternatives » qui se tenait début septembre. Il s’appuyait dans la lettre à la mairie, sur le contrat d’engagement républicain (CER) entré en vigueur début janvier. « La France n’a pas à financer des formations pour appeler à ne pas respecter les lois de la République. Ce serait quand même un comble », a notamment déclaré Sonia Backès secrétaire d’Etat à la citoyenneté lors d’une interview sur France Info le 1er octobre. Le préfet menaçait de donner suite via le Tribunal Administratif après deux courriers au maire de Poitiers. Ce dernier et le Grand Poitiers soutiennent sans faille l’association, Il y a eu un vote à main levée lors du dernier conseil municipal et du conseil communautaire pour Grand Poitiers. Cette histoire montre les effets délétères de la mise en œuvre du CER et la nécessité du travail de L.A. Coalition ou encore de ce manuel de survie des associations en milieu politique hostile.

La notion apparaît au XIXe siècle avec Henry David Thoreau qui publie un essai « la désobéissance civile » après avoir refusé de payer l’impôt américain pour ne pas financer -par son impôt- la guerre américano-mexicaine.

Une des grandes figures historiques de la désobéissance civile est Gandhi qui l’utilise contre l’impérialisme anglais en levant une marche du sel (qui servait à conserver les aliments). Cette marche s’oppose à la taxe du sel qui oblige tous les indiens à payer un impôt sur le sel et les empêche d’en prélever eux-mêmes. Gandhi impulse une longue marche vers l’océan indien pour prélever le sel eux-mêmes pour mettre fin au monopole d’Etat anglais. Elle marquera le début de la lutte pour l’indépendance.

Autres grandes figures, Martin Luther King qui lutte contre les lois de ségrégation raciale, lorsque Rosa Parks qui s’élève contre une loi ségrégationniste en refusant de laisser sa place à un blanc dans un bus de sa ville, donc un acte de désobéissance civile qui pointe une « légalité » jugée illégitime. Elle sera arrêtée suite à cet acte et Martin Luther King organise alors le boycott des bus de la ville en organisant du co-voiturage. Après une bataille très dure d’un an, la Cour suprême des Etats Unis acte en 1956 l’illégalité de la ségrégation dans les bus, restaurants, écoles et autres lieux publics.

Le principe de la désobéissance civile s’interroge sur ce qui est légal au regard de ce qui est légitime et vise à faire évoluer les lois. Sa définition s’appuie sur six éléments :

– il fait appel à des « principes supérieurs » à l’acte de désobéir, il faut là bien entendre ce que signifie ces « principes supérieurs » parce qu’ils peuvent aller de principes religieux à des principes constitutionnels.

– une infraction consciente et intentionnelle, Alternatiba s’est d’abord créée en 2013 au pays Basque pour montrer que des solutions existent face aux enjeux sociaux et climatiques pour aller vers une société de justice sociale et climatique. Un recensement qui a donné lieu à une formalisation du travail collectif avec le Transiscope. Face aux mesures largement insuffisantes, ils décident que le fait de seulement montrer les alternatives ne suffit pas et qu’il faut s’attaquer aux acteurs qui agissent contre l’intérêt général.

– un mouvement à vocation collective, il s’agit d’éveiller les esprits, de mener la bataille du récit pour faire changer les normes.

– une action non violente, qui n’est pas la même chose que pacifique, la non-violence n’évite pas le conflit mais le principe est de ne pas viser des personnes mais des adversaires, il n’y a pas d’agressions psychologiques ou physiques des personnes, l’action doit poser un dilemme à l’adversaire tout en lui laissant une porte de sortie. Il n’y a pas de dégradation matérielle qui n’ait pas été décidé collectivement à l’avance comme par exemple l’action de décrocher les portraits de Macron dans les mairies qui pointe l’inaction de la France face à ses engagements sur le climat. Pour Alternatiba, chaque procès mené contre les militant.es devient celui de l’inaction climatique et sociale du gouvernement. Beaucoup sont relaxé.es au nom de la liberté d’expression et de l’état de nécessité validant de fait le droit au recours à la désobéissance civile.

– un acte public, Alternatiba revendique d’agir à visage découvert pour montrer qu’ils sont des citoyens lambdas et pas des anti-systèmes anonymes.

– l’action vise à modifier une loi, une norme contestée, par exemple les faucheurs de chaises qui visaient BNP Paribas en 2016 protestait contre les pratiques d’évasion fiscale de la banque : l’action consistait à confisquer les chaises des agences BNP et à réclamer que l’argent de l’évasion fiscale soit rendue à l’Etat pour financer la transition écologique, seule condition pour rendre les chaises. Il s’agit d’interpeller, éveiller les consciences, poser un dilemme. BNP Paribas a porté plainte, le procès a eu lieu à Dax en 2016, BNP Paribas n’est pas venue au procès et le militant a été acquitté.

Alternatiba se saisit de ces procès pour en faire des procès politiques.